Musiques Métisses 2025, entre Fête et Nostalgie…

Jeudi 5 Juin. Angoulême.

Comme en pèlerinage, nous avons pris la route des Musiques Métisses pour assister à ce qui sera peut-être le dernier tour de piste de Salif Keita, le légendaire griot albinos.

A l’orée des années 80′ Salif Keita, avec Mory Kanté et Youssou N’Dour, ont popularisé la musique africaine auprès d’un jeune public occidental, avide de voyages et d’exotisme…

Je fus évidement pris dans la vague…

Derrière la sono, je pouvais balancer « Yéké Yéké« , « 7 Seconds » ou « Nous pas Bouger« , le dance floor ne désemplissait pas, la magie restait la même.

Quoi qu’il se passe ce soir, c’est un monument qui nous rend visite.

Albinos en Afrique est un statut précaire et il faut une sacrée dose de génie pour se sortir du pétrin…

Et c’est un génie emmitouflé dans un manteau noir et sous une casquette blanche, que l’on aide à s’asseoir et à qui l’on donne une guitare.

Quelques accords, et si les jambes ne sont plus trop là, la voix fait toujours des merveilles.

Elle nous conte les histoires de là-bas, peines de cœur et rêves de liberté.

Guitares, percussions et n’goni, le tout en acoustique pour célébrer So Kono le dernier album.

Quelques mots emprunts de gentillesse et un set tout en douceur…

Une heure pile poil et le maître a bien le droit de souffler.

Il nous a insufflé sa grâce, répandu la parole, c’est tout l’art du griot…

Vendredi 6 juin. Scène du Jardin.

Sous un déluge de percussions et couvertes de plumes colorées, les chants des filles de Suraras do Tapajòs ambiancent joliment ce début de soirée. Un souffle de fraîcheur venu du chaud Brésil avant de mettre le cap vers la Grande Scène où Tinariwen va soulever le vent du désert…

Tinariwen ce n’est pas moins de quatre guitares qui s’amusent à vous faire perdre la raison et qui connectent nos jambes à ce mood languissant et nous porte vers la transe…

Vive la Transe !

Autant de voix en forme d’incantation divine, pour la touche mystique.

Une pincée de percus, les fringues qui vont bien et voilà un billet pas cher pour Tombouctou !

Retour au Jardin où c’est la kora de Momi Maïga qui lorgne sur le jazz, accompagné d’un violoncelle, d’un violon et d’une batterie, avec une musique qui fusionne tradition et modernité.

Un joli moment…

Le clou de la soirée ce sera l’hommage à la chanteuse aux pieds nus, avec le Cesaria Evora Orchestra.

Un big band en forme d’écrin pour trois divas de la chanson cap verdienne, venues honorer la divine et faire revivre à un public en pamoison, les plus belles pages de sa carrière…

Ainsi se succèdent au micro, la douceur de Lucibela (déjà chroniquée sur ces pages), l’énergie de Ceuzany et la séduction d’Elida Almeida.

Et comme il ne sera pas dit que ce répertoire est réservé aux femmes, c’est Teofilo Chantre, un des compositeur de Cesaria qui vient clôturer la liste des guests.

Et tout ce petit monde se retrouve sur le final, pour un sublime Saudade, qui vient sournoisement nous mouiller les yeux…

Cesaria Evora à jamais dans nos cœurs…

SaudadeSaudade

Samedi 7 juin.

Troisième jour. Les jambes sont lourdes et ce soir deux gros morceaux à l’horizon…

L’orchestra Baobab et Winston McAnuff !

Et j’avoue que je suis un peu nerveux, car l’UBB joue aussi sa place en demi finale du Top 14…

Où va se cacher la conscience professionnelle ?

Pour se changer les idées, un détour par le FRAC pour une expo collective franco-brésilienne sur la thématique de l’eau.

Sur fond de décor de la Charente qui coule à nos pieds, l’expérience est plaisante…

20h45 l’orchestra Baobab déboule sur scène.

Avec leurs tuniques noires au graphisme qui rappelle des poteaux de rugby, ça va être dur de penser à autre chose…

Deux percus, une bonne basse, pour assurer devant.

Sur les ailes, deux guitaristes dont un soliste qui vous fait gagner des matchs à lui tout seul…

Je m’égare ?

En 3/4 centre deux saxos qui se tirent la bourre pour la sélection.

Et à l’ouverture, pour la première fois dans l’équipe, une chanteuse dont le déhanchement fait chavirer le stade…

Fin du set.

Je ne connais pas le score à la mi-temps, mais ici le Baobab a gagné haut la main, devant des supporteurs médusés par tant de qualités techniques et physiques !

Un petit tour au débit de boisson, où l’ami James, compagnon de virée, me donne le 19-14 pour l’Union…

Plus que 40 minutes de jeu…

En route pour la poésie de Walid Ben Selim sur fond de harpe…

C’est lunaire et ça parait beau de loin (il y a foule ce soir…), mais le brouhaha gâche un peu la magie de l’instant.

Cela permet d’attendre dans la sérénité l’issue de la rencontre, juste avant le final rasta.

23h15. 59-28 !

La fête est totale !

Place au reggae.

Les Ligerians entrent en piste.

Cinq « whitys » pur beurre avec un son gros comme ça !

Une basse qui vous plaque contre le mur et la batterie qui vous y enfonce.

Un synthé un tantinet anachronique, mais qui met son grain de sel.

Pas un skank ne manque pour accueillir la McAnuff Family.

L’athlétique Kush d’abord aux percus et Nadia sa sœur pleine de verve.

Mais la star absolue c’est Winston, le père…

Le voilà qui débarque avec sa vareuse de parade, sa casquette de commandant et un collier de ganja autour du cou !

Et le père Winston dégage une énergie et un charisme hors du commun.

Un punk dans l’âme d’un rasta !

Et s’il laisse sa place aux enfants pour reprendre son souffle ou pour tirer un bouif, on ne lui en tiendra pas rigueur tant qu’il revient balancer son flow, sa folie et sa rage de vivre !

Le public ne s’y trompe pas et fait un véritable triomphe au patriarche et à sa descendance.

Nous avions débuté jeudi par une légende et ce soir, c’en est une autre qui vient clôturer un millésime 2025 tiraillé entre la fête et la nostalgie.

LE RASCAL