Lettres jamais écrites

Jeudi soir, à Bort-Les-Orgues, nous avons assisté à la mise en scène d’un beau projet initié par Estelle Savasta de la Compagnie Hippolyte a mal au coeur . Ce soir-là, la scène nationale de L’Empreinte de Brive-Tulle s’était délocalisée pour le plus grand plaisir des lycéens bortois et de tous ceux qui ont eu l’heureuse curiosité de venir entendre ces échanges épistolaires.

Au commencement, un atelier d’écriture mené par Estelle Savasta auprès d’élèves de seconde. Ces adolescents sont amenés à écrire une lettre au destinataire de leur choix. Celui-ci peut-être décédé, pas encore né ou encore en vie, alors si le spectacle s’intitule Lettres jamais écrites, c’est surtout qu’elles n’ont jamais été envoyées et de facto n’auraient jamais dû recevoir de réponses.

Ces lettres sont extrêmement touchantes car plus qu’un exercice littéraire, elles sont l’expression de sentiments ou de questions nécessaires et personnelles pour leur auteur. On y sent une exigence de clarté afin d’être compris, -enfin- entendu, et surtout on perçoit leur sincérité. Ce sont des lettres parfois mélancoliques et tendres, parfois violentes, d’espoir aussi quelquefois. Elles peuvent être des cris ou des murmures, mais elles parlent à l’adolescent que nous fûmes et à l’adulte d’aujourd’hui.

L’originalité de la démarche artistique est d’avoir demandé à autant d’auteurs qu’il y a de missives de répondre à une lettre, en se mettant dans la peau du destinataire. On peut imaginer que ce ne fut pas simple dans tous les cas, car l’interpellation initiale est toujours directe et sans faux semblant. Mais cette parole d’adulte, acculé à répondre, est d’une force régénératrice et nous rappelle que « la fiction peut nous guérir de nos vrais chagrins ».

De l’émotion donc à la lecture de ces lettres qui viennent crever les silences et les non-dits, mais aussi de l’humour et de la légèreté grâce au jeu des deux comédiens auxquels le spectateur en sait gré.

Swaz