Spectacle percutant que celui présenté mardi soir au théâtre de L’Empreinte à Tulle. Jacqueline Écrits d’Art Brut, interprété par Olivier Martin-Salvan qu’accompagne Philippe Foch pour la composition musicale, est d’une force rare.
Souvent les textes nous paraissent étranges. Ils dérapent parfois vers l’inconnu. Mais ils se nimbent aussi de poésie et se colorent de néologismes pour traduire par des mots heurtés les souffrances dévorantes, les douleurs profondes et irradiantes de personnes hospitalisées en psychiatrie. Olivier Martin-Salvan sur scène semblait habité par ces voix, et son jeu lui-même donnait à voir un corps jamais au repos, traversé d’obsessions. Doté d’un costume-patchwork délirant, était-il chaman ou possédé ? Les deux tour à tour, ou à la fois.
Le corps et la voix du comédien, d’une égale puissance, ne faisaient qu’un pour dire ce qui ne peut être tu, représentation cathartique de vécus cachés et ignorés. Il faut saluer les initiatives à l’origine de cette création; d’abord celle de Michel Thévoz qui a réuni ces textes dans une anthologie, puis celle d’O. Martin-Salvan qui propulse hors de leurs carnets les écrits de personnes internées. Ces écrivants ont repoussé les limites du langage et cette mise en scène repousse l’oubli dans lequel ils ont vécu de nombreuses années.
Philippe Foch, de son côté, avec des matériaux bruts, composait une musique faite de fêlures et de crissements insidieux, échos de ces mots-marteaux. Enfermé dans une cage, le musicien laissait les sons s’envoler vers un public captivé.
Les spectateurs étaient de tous âges dans la salle du théâtre mardi soir mais il restait de la place et c’est dommage car les mots de Jacqueline valaient qu’on se déplace, loin du confort des pièces classiques.
Swaz