Dans ce nouveau Culture Geek je vous présente une superbe BD sur le cinéma, mêlant habilement documentation et petites anecdotes mises en dessin. Puis direction vers deux possibilités de futur dystopique, avec la BD Shangri-La de Mathieu Bablet, récit de SF récemment réédité, et avec la série L’Effondrement des Parasites désormais disponible gratuitement sur Youtube.
Histoires Incroyables du Cinéma
En voilà une BD intéressante ! Ici on quitte les étendues fictionnelles que je vous fais habituellement parcourir et on se dirige vers ce très bel ouvrage documentaire d’Elsa Gambin et Alexis Thébaudeau.
Ces deux journalistes « cinéma » nous invitent à découvrir les coulisses des films marquants du 7ème art accompagnés par de croustillantes anecdotes mises en scène à travers la bande dessinée.
Mêlant habilement texte documenté et BD, le livre offre un aspect ludique s’éloignant des volumineux bouquins qui pourraient en décourager plus d’un.
La mise en page aérée et regorgeant de petites illustrations est vraiment très agréable à parcourir, et les différents dessinateurs offrent ainsi une patte unique à chaque histoire.
Mention spéciale à James Blondel qui illustre le screen-test de Marlon Brando pour Le Parrain.
La documentation ne se contente pas d’évoquer le film présenté mais dresse également une liste des événements marquants du cinéma de l’époque.
Du Voyage dans la Lune de Méliès à Psychose de Hitchcock en passant par l’Empire Contre-Attaque et Pulp Fiction, cette bande dessinée regorge d’informations savoureuses et devrait plaire à tous les passionnés de cinéma. Il ne reste plus qu’à attendre le tome 2 !
Histoires Incroyables du Cinéma est à retrouvé en librairie ou sur le site de Petit à Petit
Shangri-La
Sortie en 2016, la BD Shangri-La a assuré la notoriété de Mathieu Bablet en prouvant définitivement toutes les qualités de cet auteur. Remportant au passage de nombreuses sélections, dont celle du festival d’Angoulême en 2017, Shangri-La vient clore la vague de rééditions pour les 15 ans d’Ankama Editions. Ce n’est que maintenant que j’ai pu poser les mains et les yeux sur ce très bel ouvrage et je n’ai clairement pas été déçu du voyage.
Dans Shangri-La, l’aventure se déroule des millions d’années après notre ère. La Terre n’est plus habitable et l’humanité est contrainte de vivre à bord d’une station spatiale, l’USS Tianzhu, propriété de Tianzhu Entreprises.
Un monde parfait où chacun a sa place, un travail et des crédits pour consommer paisiblement à l’abri de tout danger. Bien entendu ce monde parfait en apparence renferme de terribles secrets que nos héros vont tenter de découvrir.
Hormis sa qualité de dessinateur, Mathieu Bablet possède un vrai talent pour la narration et le scénario. Bien que Shangri-La soit plus ou moins prévisible, on est souvent surpris par certains retournements tellement l’on est plongé dans cette aventure aux ambiances cyberpunk.
Traitant de nombreuses thématiques, la BD nous offre une synthèse du capitalisme, montrant ses tenants et aboutissants et tous les défauts qui en découlent. En une case, Mathieu Bablet arrive à dépeindre toute l’hypocrisie de notre société.
L’auteur questionne également sur le racisme, le rapport à la publicité et la consommation, ainsi que sur le concept de révolution, en opposant des idées de révolutions pacifiques à d’autres plus radicales. Et là où il fait fort c’est qu’il ne donne pas pleinement raison à une idée en particulier. Il laisse ses personnages les incarner en développant leur idéaux pour questionner le lecteur de manière plus efficace.
Si la narration et les dialogues sont vraiment réussis, côté dessin je ne pense surprendre personne en disant que c’est un vrai régal pour les yeux.
Bénéficiant d’un grand format (24×32), Shangri-La offre des illustrations saisissantes laissant entrevoir toutes les possibilités dans des panoramas démesurés montrant à quel point l’humain est bien peu de choses dans l’Univers.
Mathieu Bablet laisse également respirer son récit en illustrant des petites scènes anodines qui rajoutent de la vie au cœur de la station, mais aussi de grands moments de calme et de contemplation, l’espace étant un terrain de jeu idéal pour ce type de composition. C’est simple, on voudrait quasiment toutes les illustrations pleine page en poster !
Étant spécialisé dans les décors, l’auteur nous offre chaque recoin de la station, tous plus saisissants les uns que les autres, avec de superbes ambiances lumineuses. C’est un vrai plaisir de parcourir cette imposante structure.
Si comme moi vous n’aviez pas lu Shangri-La, c’est le moment de vous rattraper. Amateur de BD ou de SF, voire les deux, ce récit d’anticipation devrait clairement vous ravir.
Et pour ceux qui aime lire en musique, je ne peux que vous recommander cette playlist de la bande-original des jeux Deus-Ex, qui vous accompagneront parfaitement lors de votre visite de l’USS Tianzhu !
Shangri-La est disponible en librairie ainsi que sur l’Ankama Shop
L’Effondrement
Sa place aurait été peut être plus adaptée dans un Post-Générique… Mais je profite de cette rubrique pour essayer de coller à l’actualité, malgré mon retard aussi légendaire que récurrent.
L’Effondrement c’est une série en 8 épisodes réalisée par le talentueux collectif Les Parasites qui sévit depuis plusieurs années sur Youtube. Les productions des Parasites se démarquent par une qualité cinématographique remarquable dans ses contenus. Que ce soit avec des court-métrages engagés comme Jeu de Société ou Lanceur d’alerte, avec l’excellent faux documentaire La Boucherie Éthique , avec des court-métrages axés sur la comédie et l’absurde comme Papier Prout ou avec la superbe mini série Ferdinand (dont je raffole), les Parasites ont un sacré background et un vrai talent pour la narration.
Alors vous imaginez bien que lorsqu’ils annoncent la sortie d’une série de 8 épisodes tournés en plan séquence qui traitent de l’effondrement de notre société, et bien ça donne l’eau à la bouche.
Initialement diffusée sur Canal+ et ajoutée sur Youtube de manière temporaire, L’Effondrement est enfin intégralement disponible sur leur chaîne Youtube. l’occasion pour ceux qui ne l’ont pas encore vue de rattraper leur retard.
Avec chaque épisode, Les Parasites nous immergent dans ce qui pourrait être un futur possible : pénuries, effondrement du système financier, exode, bandes individualisées… un scénario pas des plus joyeux.
Au-delà de la prouesse technique, la volonté de tourner intégralement en plan séquence nous immerge et capture notre attention, nous obligeant à suivre ces scènes remplies de tension avec comme seul échappatoire le générique de fin.
Les épisodes se suivent chronologiquement, affichant le nombre de jours écoulé depuis le début de L’Effondrement, mais l’on ne suit jamais le même personnage, ce qui permet à la série de traiter de nombreuses thématiques et de faciliter l’identification pour le spectateur.
L’Effondrement est une série qu’il faut absolument voir, notamment pour son aspect préventif. C’est brillamment réalisé, les acteurs et actrices sont tous irréprochables et le récit prend clairement aux tripes. Pour ma part l’épisode 2 restera à jamais gravé dans ma mémoire, tant son contexte, son ambiance et sa réalisation sont parfaitement maîtrisés.
Alexandre Vergne