Entre les derniers concerts pour mon compte professionnel et le festival de la BD à Angoulême, trouver le temps de lire les dernières BD reçues et en parler à travers un nouveau Culture Geek a été compliqué! Mais il est là ! En retard mais il est là ! Vous y trouverez les nouvelles sorties du Label 619, avec les premières BD solo de deux superbes dessinateurs. Je vous propose également une petite balade du côté de Rue de Sèvres pour découvrir la nouvelle BD science-fiction de Zep et un thriller étrange signé Walter Hill !
The Golden Path
The Golden Path raconte l’histoire de Jin Ha, une jeune fille fan des films de Kung Fu qui rêve de devenir cascadeuse. Tout au long de cette BD, on va suivre son parcours, de son succès fulgurant à la rencontre de ses idoles,à sa descente en enfer, jusqu’au grand final…
Ce qui marque au premier abord dès que l’on a cette BD en main, c’est la qualité d’édition : Ankama fait mouche encore une fois car elle donne envie, avec sa superbe couverture et ses lettres dorées en relief ! Passée cette première impression, on se plonge dans l’histoire de Jin Ha qui devient rapidement prenante.
Visuellement, c’est très chouette ! Le style de dessin de Baptiste Pagani apporte une sensation de fluidité fort agréable qui renforce le dynamisme des combats. Et comme toute bonne BD du Label 619, on retrouve les petits bonus entre les chapitres : ici on a droit à des fiches techniques rédigées par le réalisateur phare du Golden Path qui nous délivre techniques et astuces de cascades et, sur la deuxième partie de la BD, c’est un producteur malhonnête, hypocrite et sans morale qui nous livre ses conseils avec un humour grinçant !
On y trouve également des affiches des films dans lesquels Jin Ha a joué, dans un style réaliste qui rend hommage aux vieux films de Kung Fu avec tous les codes de ses affiches de cinéma, lesquelles apportent un aspect réel à cette histoire, comme si elle avait réellement existé.
Cette BD est un véritable hommage à l’âge d’or du cinéma de Kung Fu et à la profession de cascadeur : la frénésie des combats, des cascades et des tournages sont vraiment bien retranscrits à travers un dessin qui semble constamment en mouvement. Quant à l’histoire de Jin Ha, on s’attache à ce personnage qui part la tête remplie de rêves et se retrouve plongé dans le monde impitoyable du cinéma. Les autres personnages qu’elle rencontre sont également très réussis et attachants.
Certes, on a déjà vu et revu ce genre de parcours artistique dans divers formats… Mais d’avoir choisi une cascadeuse rend cette histoire très originale et inédite ! Un vrai coup de cœur !
The Golden Path est disponible sur le shop d’Ankama pour 19,90€
P.T.S.D.
Avec P.T.S.D., Guillaume Singelin nous embarque dans les rues d’une ville multiculturelle pour y suivre l’histoire de Jun, ex-sniper atteinte du syndrome post-traumatique et désormais sans abri. Après son retour d’une guerre impopulaire, Jun se retrouve donc, comme beaucoup de vétérans, contrainte de survivre par tous les moyens, en quête permanente de drogue pour soulager ses maux. À travers plusieurs rencontres, elle va tenter d’avancer vers une nouvelle vie, loin du champ de bataille.
Si ce sujet a été maintes fois traité dans différents médias, ce qui frappe ici en premier lieu, c’est le décalage entre le dessin, cartoonesque et presque mignon, et le thème traité, mature, sérieux, voire assez violent sur certains aspects.
Personnellement, je suis raide dingue de ce style graphique : ce côté mignon et fourmillant de détails est un régal pour les yeux ! Le design des personnages est vraiment très réussi, les phases d’actions sont dynamiques et lisibles, le découpage des scènes est parfait, et on prend le temps de montrer les choses.
Je vous conseille d’aller jeter un œil sur le compte Instagram de Guillaume Singelin, (sur lequel j’ai flashé !) où vous trouverez plein de supers dessins du même style, mais également dans d’autres genres très différents, de quoi apprécier toute la diversité du talent de ce dessinateur.
Dans P.T.S.D, Guillaume Singelin nous dresse également les portraits de supers personnages aux profils atypiques. Tout d’abord Jun, personnage au caractère solitaire et bien trempé, mais également Léona (et son fils Bao, au design trop mignon !), qui tient seule son petit restaurant et offre de bon cœur des repas aux vétérans sans abri, après sa rencontre avec Jun avec qui elle se sent liée. Un personnage sensible que l’on aimerait voir plus souvent dans la vraie vie ! Il y a aussi le personnage de Grey, un vieux vétéran qui vit entouré d’animaux. Il confie à Jun son chien Red afin qu’elle ait un peu de compagnie et qu’elle s’adoucisse : une sorte de nouveau mentor auquel on s’attache vite.
Qualité du dessin, souci du détail… Et les décors ? Tout d’abord, l’auteur a choisi de ne pas citer la guerre à laquelle Jun a participé. Il en est de même avec la ville dans laquelle la jeune femme tente de survivre. Une ville fortement inspirée par Tokyo mais où règne un vrai multiculturalisme. Graphiquement ce décor est très riche, et on a même droit à deux pages entières avec uniquement des cases nous montrant la vie de la ville qui semble être une vraie fourmilière. Cette histoire n’a donc aucun repère réel et laisse place entière à notre imagination. Un autre point intéressant : l’utilisation des flashbacks de Jun. On passe d’une scène dans la ville, dans le présent, à un flashback soudain qui s’arrête aussi soudainement qu’il a débarqué. Aucune indication sur le lieu, la date, rien, juste un flashback. Cela donne un côté immersif, comme si on entrait dans la tête de Jun et dans ce qu’elle a vécu au front.
Bref. Gros coup de cœur pour cette BD ! Que ce soit par le sujet choisi, la narration ou le style graphique, tout est pleinement réussi ! En bonus, à la toute fin, vous trouverez un petit making-of avec des explications de Guillaume Singelin, mais également des designs de persos en couleurs ainsi que toute une série de croquis uniquement en noir et blanc… Un petit bonus vraiment plaisant pour prolonger l’aventure ! Et si vous avez encore soif de bonus, un patch en édition limitée est offert pour l’achat en librairie. Alors empressez vous de vous procurer cette petite perle !
P.T.S.D. est également disponible sur le shop d’Ankama pour 19,90€.
Et voici le trailer vidéo !
Paris 2119
Paris dans 100 ans, vous l’imaginez comment ? Dans la démesure et le fantasme, avec voitures volantes, écrans publicitaires en hologrammes recouvrant des buildings à la Blade Runner ? Ou encore en une ville s’étendant sous terre et plus haut dans le ciel ? Et bien ici rien de tout ça !
Non. Le Paris du futur imaginé par Zep ne ressemble pas à ça. C’est à un Paris à l’architecture classique à laquelle viennent se mêler des bâtiments géométriques aux surfaces lisses, qui lui donnent un aspect sobre et élégant. À cet esthétique viennent se rajouter quelques éléments holographiques et des petits drones qui surveillent les rues. Les beaux quartiers sont protégés d’une pluie constante grâce à des champs magnétiques, marquant l’écart social avec les quartiers pauvres à l’aspect bien plus moroses.. Afin de stopper la pollution causée par les déplacements de l’homme, une entreprise à mis au point le Transcore. Un système de cabine de téléportation individuelle disponible un peu partout dans les grandes villes et dans les immeubles. Cette dernière permet des voyages rapides, simplifiés et sans polluer.
C’est dans cette ambiance aux allures cyberpunk, mise en valeur par le dessin précis et élégant de Dominique Bertail, que l’on va suivre l’histoire de Tristan, un jeune homme en marge de la société pour sa profonde nostalgie pour le siècle dernier. Ce dernier entretient une relation amoureuse avec Kloé, une femme d’affaires séduisante en accord avec son temps.
C’est alors que Tristan croise le chemin d’une femme à l’air complètement hagard, sortant d’une cabine Transcore… Cette rencontre remettra en cause tout ce que Tristan pensait connaître à propos de cette technologie utilisée par des millions de gens, quand il enquêtera sur les événements étranges auxquels il a assisté, faisant penser à un vaste complot…
L’histoire est prenante mais… beaucoup trop courte ! On est happé par cette histoire intrigante et par les dessins particulièrement réussis, mais le rythme, trop rapide, nous amène, du moins pour mon goût, trop vite au dénouement.. Une suite serait donc bienvenue pour ne pas rester sur cette petite frustration ! Pour info, pour prolonger ce plaisir de lecture, vous pouvez également vous procurer la version luxe de cet album qui propose en bonus un cahier graphique !
Paris 2119 / Rue de Sèvres / 17€ (plus de renseignements ici.)
Le Spécimen
Avec Le Spécimen de Walter Hill, on embarque pour un thriller aux aspects surnaturels, dans un centre de détention au fin fond de la Sibérie, où l’on suit le docteur Irina Danko, chargée de récolter les glandes du cerveau sur les détenus condamnés à mort après leur exécution, afin de faire évoluer la médecine. Lors de l’exécution d’un des plus dangereux prisonnier, un black out se produit… L’électricité rétablie, ce n’est plus la même personne dans la chaise électrique… Mais un homme mystérieux, au tempérament extrêmement calme, qui semble pouvoir manipuler à souhait les gens qui l’entourent… Et qui témoigne un intérêt tout particulier à Irina.
On va alors assister à un long interrogatoire mené par Irina qui va tenter de percer le mystère de cet homme. Ces séquences sont entrecoupées avec les rêves étranges de la jeune femme, qui la projettent dans d’autres époques. Ces rêves sont d’ailleurs connus de l’homme mystérieux, qui semble toujours avoir un coup d’avance sur tout le monde. Le mystère ne fait que s’épaissir au fur et à mesure des séances… Et on est tenu en haleine tout le long de la BD !
Le dessin de Julien Ribas, simple mais efficace, retranscrit à la perfection les émotions des personnages. Mention spéciale au design de l’homme mystérieux qui dégage un vrai charisme.
Comme pour toute BD de ce genre, il est difficile d’en parler sans spoiler les éléments clés… Je peux donc juste vous dire que « Le Spécimen » est un huis clos original au scénario extrêmement prenant et que cette BD bénéficie également d’une bonne durée de lecture ! Que demander de plus ?
Le Spécimen / Rue de Sèvres / 18€ (ici)
Alex