Juke Box N°58

Dans ce Juke Box on va y aller crescendo avec un petit tour d’horizon de mes dernières découvertes post rock, rock indus et metal, qui commencent à dater un peu maintenant, mais vous savez… mieux vaut très tard que jamais !

Avec les très bonnes découvertes qu’ont été les premières parties de Cult of Luna à Paris (voir chronique ici), à savoir A.A.Williams et Brutus (je vous recommande très chaudement les deux albums de ce dernier qui sont de pures pépites), j’ai voulu jeter une oreille aux premières parties qui assureraient la tournée américaine de Cult of Luna. Et bien il s’agit de deux nouvelles pépites.

Emma Ruth Rundle

Ça faisait un moment que je voyais le nom de la chanteuse américaine circuler à droite à gauche sur les réseaux. J’ai donc fini par y jeter une oreille en choisissant son dernier album On Dark Horses.

La jeune femme produit un post-rock mélancolique mélangé à des influences et sonorités folk. D’une incroyable douceur, la voix d’Emma Ruth Rundle envoûte dès les premières notes avec Fever Dreams. L’instrumental en fond, d’une belle subtilité, berce l’auditeur avec ses guitares saturées et hypnotisantes lors du refrain.

La voix de la chanteuse prend clairement aux tripes et dégage énormément d’émotions, appuyant avec puissance des textes essentiellement tournés vers sa recherche intérieure et son histoire.

Et c’est là que Emma Ruth Rundle fait fort, car même sans connaître les paroles et le sujet, on ressent ses émotions.

Utilisant la musique de manière thérapeutique, l’artiste dépeint sa situation personnelle comme avec le très beau Darkhorse. Et même si les titres tirent vers un passé douloureux, on entrevoit une évolution vers quelque chose de positif et de lumineux.

Oscillant sans cesse entre douce lumière et ténèbres saturées, l’album semble atteindre son apogée avec Dead Set Eyes et le magnifique Light Song, où la voix d’Emma se mêle à celle d’un homme, lointaine, tel un écho.

L’album se clôture avec un autre très beau morceau,  Apathy on the Indiana Border suivi de You Don’t Have to Cry qui achève le disque en toute douceur.

Une véritable pépite pour ma part. Une petite bulle douce et mélancolique riche en émotions subtiles. Une artiste que je recommande à tous les amateurs et amatrices de folk et post rock.

Je vais de ce pas pousser mes recherches vers les autres projets musicaux d’Emma Ruth Rundle, à savoir The Nocturnes, Red Sparowes et Mariages.

On Dark Horses est disponible en CD, Vinyle et format digital

Intronaut

Le second groupe à effectuer les premières parties de Cult of Luna aux États-Unis, était Intronaut. C’est donc avec le dernier album, Fluid Existential Inversions, sorti en février dernier, que je me suis plongé dans l’univers de ce groupe.

Et dès le premier morceau, Cubensis, il faut dire que le groupe accroche par la batterie qui martèle un rythme agité, les riffs aigus de guitares qui transportent, la basse redoutable qui tabasse efficacement et la voix du chanteur, à la fois claire et légèrement rocailleuse.

L’alchimie est parfaite et Intronaut livre un metal progressif aussi agressif qu’enivrant, rappelant par moments la musique de Tool.
Avec des morceaux aux compositions complexes comme l’excellent Contrapasso, le groupe fait clairement voyager par sa musique et offre de magnifiques moments de rage comme avec le final incroyablement maîtrisé de Speaking of Orbs, mais aussi de vrais temps de calme contemplatif et hypnotique comme avec la seconde moitié de Tripolar.

Un groupe à découvrir pour tous les amateurs de metal progressif et de compositions musicales léchées.

Fluid Existential Inversions est disponible en CD, vinyle et format digital

Wallack

On continue dans l’univers du metal/rock en faisant un crochet vers un groupe orienté rock indus qui nous vient de Poitiers. Wallack, que je vous avais présenté dans un précédent Juke Box, vient de sortir avec l’aide d’un financement participatif, son nouvel album Black Neons, qui il faut le dire, m’a mis sur le cul.

Après avoir saigné White Noise, voilà que Black Neons vient offrir un nouveau panel de sonorités et de compositions riches, aux riffs massifs, planant et transcendant .

Dès l’ouverture on remarque avec plaisir la présence bien marquée du synthé qui apporte une touche électronique encore plus présente que dans les précédents albums. Rien qu’avec l’ouverture sur All That’s Ever Been Pt. 1 cette sonorité électronique fait son petit effet.

Avec un commencement plus sombre au son massif et lourd, Wallack offre une ambiance orageuse teintée d’éclairs et d’éclaircies, notamment par la voix du chanteur, toujours aussi efficace, envoûtante, rocailleuse et en parfaite harmonie avec les sons saturés des guitares.

L’orage continue avec le très bon Anxiety, et une nouvelle intro tout en synthé avec ce qui semblerait être un sample trafiqué de la respiration de Dark Vador. Une ambiance noire et électronique rejointe aussitôt par de nouveaux riffs puissants et saturés qui viennent donner la furieuse envie d’headbanguer.
Sûrement la pièce maîtresse de cet album, avec son air entêtant à l’ambiance spatiale.

La suite s’avère un peu plus lumineuse en terme de sonorités. Avec des titres comme Century Boy, Black Neons, ou encore le très prenant Slaughter.

L’album s’achève avec Burnt et All That’s Ever Been Pt. 2, qui offre une clôture instrumentale hypnotique et parfaite pour ce nouvel opus du groupe.

Wallack est un groupe qui devrait parler aux amateurs de rock, et plus particulièrement aux adeptes de sonorités indus et de post rock. Encore une belle pépite à se mettre sous la dent… et les oreilles.

L’album est disponible sur leur Bandcamp en format digital, CD et vinyle

Igorrr

Si vous êtes encore là, accrochez vous… Parce que l’album qui suit est des plus… spécial. Pour ceux qui ne connaissent pas, Igorrr est un artiste français mélangeant diverses influences dans un métal qui explore sans cesse de nouvelles sonorités en des compositions originales et souvent improbables. Des sons électroniques brutaux rappelant certains mouvements de la musique électro, des rythmiques sauvages de batterie, du scream, de la musette, de l’opéra et des guitares aux riffs prenants, du baroque… Tout ça compose Igorrr, véritable ovni de la scène musicale.

Invitant différents artistes (ses habituels comparses entre autres) pour enrichir son projet musical, Igorrr nous offre une fois de plus un album étonnant aux compositions variées.

Alternant brutalité, douceur, et moments contemplatifs, ce Spirituality and Distortion démarre sur des chapeaux de roues avec Downgrade Desert, qui mélange death metal et sonorités orientales. Le titre est accompagné de splendides envolées lyriques de Laure Le Prunenec, chanteuse habituée du projet, épaulée par des chœurs sauvages apportant un peu de noirceur à l’ensemble.

On voyage entre metal et musique classique avec des titres comme Nervous Waltz, oscillant entre riffs de guitare puissants et chœurs accompagnés de violons, dans lesquels viennent parfois se perdre des sons électroniques. L’étonnant Very Noise, dont le clip avait été remarqué à sa sortie, vient parfaitement emboîter le pas pour nous plonger encore plus dans un univers où tout semble pouvoir se réaliser.

Et c’est le cas ! L’album nous balade sans cesse d’un style à un autre. Du clavecin et du chant d’opéra avec Hollow Tree, toujours plus de sonorités orientales se mêlant au metal avec Camel Dancefloor, du death metal pur et dur avec le puissant Parpaing et son passage électronique rétro génialissime, on passe même en mode musette, saupoudré de rythmes de batterie sauvages et de scream avec Musette Maximum.
L’album atteint clairement son climax avec la seconde partie qui commence avec le puissant Himalaya Massive Ritual, qui prouve la maîtrise et la qualité des compositions d’Igorrr. De même qu’avec Overweight Poesy qui nous plonge dans un chaos musical parfaitement orchestré. Coup de cœur également pour le très beau morceau Barocco Satani, qui nous fait profiter des performances vocales de Laure Le Prunenec.

L’album se clôture avec le surprenant Kung-Fu Chèvre et ses airs festifs de musique tzigane qui se mêlent encore à des sonorités et rythmiques de metal. Un mélange unique et réussi.

Igorrr nous livre un nouvel album, encore plein de surprises, aux influences multiples. Savamment composé, chaque instrument, son et voix est à sa place au bon moment. Et cette touche orientale prédominante sur l’ensemble de l’album est un vrai régal.

Toujours aussi inattendu et riche, le groupe crée un univers mélangeant plusieurs univers pour un résultat réussi qu’il nous tarde de voir en live, tant leurs concerts sont des expériences à vivre.

Spirituality and Distortion est disponible en CD, vinyle et en format digital

Alexandre Vergne