• zinzinule,, je te suis • 9 •

A défaut de pouvoir arpenter les rues comme si de rien n’était, je me réfugie dans les paysages de pages et occupe mes mains. Ce mois-ci, donc : du fusain rêveur, des pas de danse et du graff. A bientôt !

Le temps n’existe pas

@Actes Sud

Ce très beau livre, au format imposant (les pages font 40cm de haut), présente des dessins exposés en 2018, à Arles, sous le même titre : le temps n’existe pas.

Le texte vert d’eau nous mène près d’un lac noir, par des chemins de mémoire et d’images. Oniriques, les paysages naissent d’abord dans nos têtes avant de prendre ombre dans les traits de fusain de Réjean Dorval. Il s’agit d’un projet à quatre mains, travaillé avec le verbe d’Emmanuel Druon et tissé dans l’étoffe sans fin des rêves d’enfants. 

Chaque page est un écho aux mots, un monde en soi. Noirs et blancs, les dessins nous parlent d’infini : Saturne, la cime des arbres, une biche sous les étoiles…

Le temps n’existe pas, il est sentier, exploré ou en friche : nouvelles pistes, nouvelles lumières.

Cette poésie nous offre de nouveaux espaces, de nouvelles histoires pour sortir de soi, déconfiner nos horizons. En suivant le narrateur jusqu’au lac noir, saison après saison, on regarde autour de nous, on attrape ses souvenirs mélangés aux dessins. “la tête nous tourne”, et c’est juste ce qu’il fallait.

@Actes Sud

Le temps n’existe pas, dessins de Réjean Dorval et texte d’Emmanuel Druon, Actes Sud, 2020 / 29€

Incarner une abstraction

@Actes Sud

Nouvel essai paru dans l’apaisante collection “le souffle de l’esprit” chez Actes Sud, “Incarner l’abstraction” est un texte d’Anne De Keersmaeker, retranscrit après une conférence. La danseuse et chorégraphe contemporaine revient sur son parcours et les définitions qu’elle donne à son art. Nous parlant de corps et de gravité, de rythme et de résistance au nihilisme, elle émaille son propos de référence à ses spectacles, dont les vidéos sont consultables en ligne. On peut ainsi découvrir quelques-unes des chorégraphies majeures de notre temps, et comprendre sensuellement et techniquement son propos.

“l’horizontal, le vertical, la marche et le souffle, et puis tourner et sauter, et puis chercher l’envol et défier la gravité”

Parlant aussi de son rapport à la musique, à l’humain, elle offre un regard de créatrice, précis, poétique et engagé. En peu de mots, Anne Teresa de Keersmaeker réussit à partager l’essentiel et à interpeller notre propre rapport physique au monde.

@Actes Sud

Incarner l’abstraction, par Anne Teresa De Keersmaeker, Actes Sud, 2020 / 11€

Figures de graffeuses

A la suite de leur premier ouvrage consacré aux graffeuses, paru en 2018, les deux autrices récidivent et célèbrent 50 femmes au travers de leurs murs et peintures, cette fois-ci orientées vers les personnages. Ancrés dans la culture graffiti, les “persos” donnent à voir, de manière plus accessible que les lettrages, la complexité et la profondeur des univers graphiques de leurs créatrices. 

Réalisé avec beaucoup de soin, ce livre laisse les graffeuses se présenter : elles nous narrent leurs expériences et entrées dans le monde des bombes de peinture, leurs évolutions stylistiques et philosophies de vie. Leurs œuvres sont adroitement organisées, pages après pages, et attestent d’une immense diversité.

Que l’on soit graffeur/se ou profane, amateur de vandalisme coloré ou simple curieux, ce livre est une belle balade urbaine auprès des artistes. Un ouvrage nécessaire dans un milieu qui reste majoritairement masculin.

@éditions Alternatives

Figures de Graffeuses, par Audrey Derquenne et Élise Clerc, éditions Alternatives, 2020 / 28€

Nush