Juke Box N°78

Me voici de retour ! Pas pour vous jouer un mauvais tour, mais pour vous parler des dernières pépites musicales qui sont venues me ravir les esgourdes. Alors oui comme à mon habitude le retard est de mise, mais que voulez-vous quand on a plusieurs projets en même temps et une seule vie c’est pas facile !
Bref, je vous emmène dans les tréfonds d’une ville cyberpunk avec Dan Terminus, avant de remonter à la surface pour aller se mater un nanar plein de pulp avec Ninja Cyborg. On fera un petit détour du côté des plaines désertiques entouré de mystère avec Carpenter Brut, avant de rejoindre les terres orageuses de Cult of Luna et celles quelque peu plus lumineuses d’Architects. C’est parti pour cette nouvelle odyssée musicale !

 Dan Terminus

Ça faisait un bout de temps que Dan Terminus m’intriguait. Les nombreuses fois où je suis tombé par hasard sur ses morceaux, ils me mettaient chacun une petite claque. Il en aura fallu un de plus pour me faire chavirer et me pousser à écouter sa discographie.

C’est avec Ruins, morceau dévoilé début août comme premier aperçu de son nouvel album, que je me suis pris une bonne claque et que je me suis donc penché sur cet artiste.


Bien que le clip soit hypnotisant et que la mélodie soit des plus enivrante, c’est avant tout l’utilisation de la batterie qui m’a mis sur le postérieur. Du plus loin que je me souvienne, aucun des morceaux de synthwave que j’ai écouté à ce jour ne l’utilisait de la sorte, habitué aux simples beat efficaces. Dan Terminus vient donc, avec l’aide de ce seul instrument, apporter une vraie fraîcheur au genre. Et il ne s’agit là que du morceau “teaser” ! Alors, qu’en est-il de l’album sorti en septembre dernier?

Last Call For All Passengers démarre sur des chapeaux de roues. Si Ruins était déjà d’une redoutable efficacité, le premier morceau Oubliette vient à mon sens le surclasser. Avec un son très synthwave ponctué de sonorités plus agressives, le morceau nous emporte dès les premières notes de batterie dans une rythmique endiablé bien loin de celle à laquelle le genre nous a habitués. Oubliette prend aux tripes et nous possède rapidement, nous donnant une furieuse envie de danser.

Mais Dan Terminus ne s’arrête pas là et continue à nous amener dans les bas-fonds de son univers avec l’excellent Requiem, qui conserve également cette mise en avant de la batterie mêlée cette fois-ci à des sons plus “industriels ».

Les sonorités ne sont pas sans évoquer The Prodigy : rythmique se donnant parfois des airs de drum and bass, certaines sonorités de synthés, mélange entre sons festif, agressifs et sombres, tout invite à la danse…
Tous ces petits éléments viennent donner une nouvelle couleur à la synthwave et nous offrent un album varié et d’une belle originalité.

Le parallèle avec The Prodigy est encore plus marquant avec March et son intro à la guitare suivie d’une furieuse rythmique. De même avec l’excellent Abattoir !

On a même droit à un morceau aux influences très techno, avec Feral et son clip aussi hypnotisant qu’étrange. Et que dire du superbe Excalibur qui vient clôturer en beauté cet album.


Avec ce nouvel album Dan Terminus fait très fort. En conservant sa « patte » personnelle tout en restant dans le genre de la synthwave, il arrive à apporter de nouvelles choses, en mêlant les influences. Un album hybride teinté d’une ambiance très cyberpunk, à la fois mélancolique, sombre et survitaminée…. Que l’on espère vite savourer en live !

L’album est disponible en CD pour la modique somme de 12,99€, ou en format digital à prix libre, comme le reste de la discographie de Dan Terminus, sur sa page Bandcamp

Ninja Cyborg

On continue à se balader dans l’univers tout en néons de la synthwave avec Ninja Cyborg. Rien qu’avec le nom du groupe, la couleur est annoncée : ici existe l’ambiance cyberpunk premier degré et place à la pulpe et au côté nanar des 80”.

Sous ces airs assumés de bande-originale, The Sunny Road nous balade dans cette ambiance de jungle urbaine nocturne où l’on voit défiler tout un tas de personnages haut en couleurs.

Quand je vous dit que l’aspect bande-originale est totalement assumé, ce n’est pas pour rien. Dès le premier morceau, notre duo de frenchy compose un air de générique de production hollywoodienne rappelant celui de la Fox ou encore la Paramount. S’enchaîne directement le morceau d’intro, illustrant avec brio le générique de début, plantant le décor dans un air rythmé des plus entraînant !

Les morceaux s’enchaînent avec fluidité et nous embarquent dans une histoire que seul notre imaginaire peut construire… A moins que vous choisissiez de visionner ce super clip en stop-motion pour le morceau The Sunny Road ! Avec sa patte « maison » à l’ambiance bien rétro, on arrive aisément à s’imaginer la suite de cette histoire digne des plus beaux nanars de SF.


Les sons d’ambiances se mêlent à la musique, que ce soit avec la piste d’intro ou encore avec le très bon Masters of Fury: The Cobra Strikes Back. C’est habilement mixé et cela nous plonge encore plus dans cette atmosphère de bande-originale que je trouve très séduisante.
Oscillant entre scènes d’action à la musique déchaînée et morceau au calme contemplatif, comme Lightning, le rythme de l’EP est parfaitement orchestré. 

Encore une belle découverte pour ma part, l’aspect cinématographique totalement assumé de Ninja Cyborg est des plus intéressant et j’attends avec impatience leurs prochaines sorties.

Leur album est disponible sur leur page Bandcamp en format digital pour 5€ ou en version cassette pour 10€

Carpenter Brut – Fab Tool

Toujours dans les sorties qui datent désormais, les fans de synthwave ont à nouveau été gâtés puisque Carpenter Brut a sorti le 27 novembre dernier un nouveau single.

Il avait averti sur ses réseaux que ce morceau en featuring avec David Eugene Edwards serait bien différent de sa patte habituelle, et pourtant… quelle claque !
Accompagné d’un splendide clip aux aspects oniriques et contemplatifs, Fab Tool est porté par une instru moins synthwave qu’on aurait pu le penser, et par la superbe voix de David Eugene Edward. La symbiose entre les deux artistes est fantastique et offre un morceau unique à l’aura mystérieuse.

Très très impatient de voir la suite des projets de Carpenter Brut !

Cult of Luna

On ne s’y attendait pas ! Après le magnifique Dawn to Fear (chroniqué ici) sorti en septembre 2019, voilà que le groupe suédois revient à la charge avec un nouvel EP The Raging River, premier disque sorti sur leur label indépendant Red Crk.

Un  nouveau voyage musical s’offre à nous sur les terres sauvages baignées de brouillard où se mêlent à nouveau le calme et la tempête.

S’ouvrant sur Three Bridges, dévoilé en décembre dernier, le groupe nous montre à nouveau son savoir-faire en matière de montée en puissance. Démarrant sur des notes mystérieuses mêlant un sentiment de contemplation et d’errance, le morceau prend des teintes orageuses avec l’arrivée de la voix toujours aussi puissante de Johannes Persson. Ce n’est qu’après 2 minutes que les synthés viendront percer le ciel ombragé que dépeint le morceau. Tout en subtilité, les instruments se mélangent entre eux, des sons à peines perceptibles viennent ajouter des nuances au tableau, et le morceau prend peu à peu son envol, entraîné par les guitares et mené par le chant. Puissant, rempli de subtilité, maintenant un équilibre entre calme et rage, Three Bridges offre une ouverture parfaite pour la suite de l’EP ainsi que l’étendue de la maîtrise du groupe.

Le second morceau continue sur la même lancée, la tempête se poursuit avec davantage de rage. What I Leave Behind offre une ambiance sombre ainsi que de la nouveauté avec l’utilisation de la basse, quasiment isolée du reste et mise en valeur par la voix saturée de Johannes. Un élément qui percute dès la première écoute et qui apporte de la fraîcheur dans le style de Cult of Luna.

Les sonorités enragées laissent ensuite place au calme. Comme toujours, le groupe sait parfaitement rythmer son EP, et l’on se retrouve désormais porté par l’onirique Inside of a Dream. La voix de Johannes laisse place à celle de Mark Lanegan, unique featuring de l’EP. Un morceau particulièrement apaisant, à l’ambiance contemplative qui vient donner davantage d’élan pour la suite. Pour ma part, j’ai eu un coup de cœur pour ce morceau.

Si l’on était dans le rêve précédemment, I Remember semble nous ramener dans les ténèbres avec son intro lente et empreinte de noirceur. Le morceau nous balade dans une atmosphère ténébreuse, jusqu’à l’arrivée d’un riff de guitare aiguisé que je trouve être le gros point fort de ce morceau.

L’EP se clôture en beauté avec Wave After Wave. On est assez loin du final épique de l’album précédent, mais Cult of Luna arrive à nous emporter. Avec sa rythmique et ses nappes de synthé, cet ultime morceau donne une sensation assez saisissante de temps qui défile et amène à une clôture plus mélancolique qu’à l’accoutumée, magnifiée une fois de plus par l’utilisation des synthés.

Cult of Luna nous régale encore. A la fois contemplatif et enragé, ce nouvel opus ne trahit pas leur patte désormais bien reconnaissable, mais vient tout de même apporter de la nouveauté en évitant la redondance.

The Raging River est disponible en format digital, CD et divers éditions vinyls sur le site de Red Crk et sur la page Bandcamp du groupe

Architects

Après le très très bon Holy Hell sorti en 2018, les anglais d’Architects reviennent à la charge avec le tout aussi bon For Those That Wish To Exist.

L’album s’est progressivement dévoilé avec quatre singles avant de sortir le 26 février dernier.

Après une première écoute quelque peu mitigée, c’est lors de la seconde, une fois la surprise passée, que je me suis rendu compte du potentiel de l’album. Parcouru par un souffle épique, Architects nous offre une véritable bande-originale qui pourrait accompagner l’apocalypse, comme le laisse suggérer la superbe intro Do You Dream Of Armageddon ?

L’album nous embarque dans une véritable épopée, portée par le son puissant du groupe britannique et magnifié par l’ajout plus récurrent de touches symphoniques.

De Black Lungs a Discourse Is Dead on reconnaît clairement la patte du groupe. La batterie qui martèle sauvagement le rythme, les guitares et les basses qui sonnent à l’unisson avec la puissance d’un tir de sulfateuse, et la voix de Sam Carter qui rugit tout en gardant une forme de mélodie. Mais clairement le petit plus qui fait son effet, c’est ce fond symphonique qui vient se mêler au reste et apporte ce souffle épique dont je parlais précédemment. Et c’est encore plus frappant avec le splendide Dead Butterflies dévoilé il y a un mois. Un des meilleurs morceaux de l’album à mes yeux.


La suite s’enchaîne à merveille, avec le très bon An Ordinary Extinction. Entre les sonorités électroniques et le riff de guitare du refrain, le morceau possède une aura entêtante et totalement épique.

Et que dire de la suite… même si j’étais mitigé à la première écoute sur l’ensemble, Impermanence m’a mis une telle claque que j’ai eu un vrai coup de foudre instantané. En featuring avec Winston McCall, Impermanence fait l’effet d’un énorme coup poing dans le visage, avec sa rythmique saccadée et son aura obscure. Le passage de Winston McCall vient rajouter une bonne dose de rage avant de laisser place à un final plus mélodique. Un morceau que je place parmi mes coups de cœur de cet album, aux côtés notamment du featuring avec Mike Kerr (chanteur de Royal Blood, que j’affectionne particulièrement) sur Little Wonder, qui fait quelque peu figure d’outsider.
Avec sa rythmique et son air entrainant, il faut avouer qu’on n’imagine pas un tel morceau sur cet album. Et pourtant, entre son air dansant à base de sonorités électroniques et porté à merveille par le duo que forme Sam Carter et Mike Kerr, Little Wonder ne part pas pour autant dans une direction pop et reste ancré dans le style du groupe avec notamment des passages plus metalcore.

Animals arrive juste derrière pour revenir davantage dans le style du groupe. Dévoilé en octobre dernier, ce morceau offrait un avant-goût des plus savoureux, avec un chant pas intégralement à base de scream et une utilisation du synthé fort efficace.

L’album touche à sa fin, avec notamment Demi God où la petite touche symphonique est davantage présente.
Le tout s’achève avec le très beau et apaisant Dying Is Absolutely Safe, qui apporte un peu de lumière et chasse les ombres qui planaient depuis le début.

Toujours avec des textes aux thématiques touchant entre autres le divin, la mort, les figures bibliques ou encore le genre humain, Architects offre un magnifique album, oscillant entre lumière et obscurité. Mêlant habilement leur patte metalcore à de nouvelles sonorités, allant de l’électronique au symphonique, le groupe conserve son style tout en explorant de nouveaux horizons. Le chant de Sam Carter est toujours aussi bon, et sa capacité à passer du scream à un chant “plus classique” offre de beaux moments et davantage de nuances, tout en conservant cette mélodie si particulière.
Un très gros coup de cœur pour ce nouvel opus du groupe britannique.

For Those That Wish To Exist est disponible partout en format digital, CD et vinyle

Alexandre Vergne